Aperçu

 Le flux de déchets qui croît le plus rapidement dans le monde est celui des déchets électroniques, dont le rythme est estimé à 5 % l’an. En effet, la croissance économique rapide et l’urbanisation ont été accompagnées d’une augmentation à la fois de la consommation d’équipements électriques et électroniques (EEE) et de la production de déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE).  La plupart des déchets électroniques produits dans le monde finissent par être expédiés vers des économies émergentes en Asie et en Afrique. Par exemple, en 2019, sur les 53 millions de tonnes de déchets électroniques générés, environ 80 % se sont retrouvés en Asie et en Afrique.

Avec une gestion appropriée des déchets électroniques, plus de 92 % des matériaux, des métaux précieux aux plastiques, peuvent être récupérés et réutilisés. Cependant, le traitement approprié des déchets électroniques pose de multiples problèmes en raison du coût.

Des politiques telles que la responsabilité élargie des producteurs (REP) ont été mises en œuvre dans la plupart des pays développés, qui obligent les fabricants et les importateurs de produits électroniques à reprendre les produits électroniques arrivés en fin de vie. L’impact majeur des déchets électroniques sur les personnes et l’environnement a fait des déchets d’équipements électriques et électroniques l’une des filières prioritaires de la gestion mondiale des déchets. De plus, la gestion des déchets électroniques est l’un des flux de déchets les plus complexes en raison de la grande variété de produits contenant des dispositifs électroniques, rendant ainsi leur récupération très difficile. Il est devenu important de procéder à la caractérisation de ces flux de déchets, afin d’aider à mettre au point un système de recyclage et de récupération rentable et respectueux de l’environnement. 

Le recyclage des déchets d’équipements électriques et électroniques est important non seulement pour réduire les volumes de déchets, mais aussi pour favoriser la récupération de matériaux de valeur et ainsi réduire l’utilisation de matières premières vierges. Un large éventail de produits a été classé dans les équipements électriques et électroniques, y compris les petits et gros appareils ménagers, les équipements informatiques et technologiques (par exemple, téléphones, jeux vidéo, matériel de télécommunication, etc.). La fin de vie de ces produits les transforme en déchets électroniques ou DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques). 

 Les déchets d’appareils électroniques contiennent principalement des métaux précieux tels que le fer, le cuivre, l’aluminium et l’or, ainsi que d’autres non-métaux tels que les plastiques et le verre. De même, ils contiennent des matières toxiques telles que le plomb, le mercure, l’arsenic, le cadmium, le sélénium, et des polluants organiques persistants (POP) tels que les polychlorobiphényles (PCB) et les retardateurs de flamme bromés, etc., qui ont des effets néfastes sur l’environnement et la santé humaine. 

Référence

https://link.springer.com/article/10.1007/s42452-022-04962-9

https://doi.org/10.1093/scipol/scab005

Les déchets électroniques et la pollution

La mauvaise gestion des déchets électroniques, comme les activités de brûlage à ciel ouvert, entraîne le rejet de polluants organiques persistants non intentionnels (POPNI) et d’autres produits chimiques qui présentent de graves menaces pour la santé humaine.

Les déchets électroniques dans le contexte africain

Le développement des TIC dans les économies émergentes, en particulier en Afrique, dépend principalement des EEE d’occasion ou remis à neuf, dont la plupart sont importés sans vérification préalable de leur fonctionnement et sont donc pour la plupart remplis de déchets. Par conséquent, les déchets électroniques constituent un secteur économique entièrement nouveau qui offre des opportunités commerciales autour des transactions, de la réparation et la récupération de matériels destinés à la vente. L’élimination et le recyclage inappropriés des déchets électroniques sont particulièrement graves en Afrique où la surveillance environnementale et l’application de la réglementation sont relativement faibles. Ceci s’explique par le manque d’infrastructures adéquates pour gérer les déchets sans danger dans de tels contextes ; en conséquence, les déchets sont enfouis, brûlés à ciel ouvert ou déversés dans des décharges. L’absence de réglementation et le laxisme dans l’application des lois contrôlant le mouvement des déchets électroniques vers les pays africains ont également favorisé un accroissement des opérations informelles de traitement des déchets électroniques. La mauvaise gestion des déchets électroniques en fin de vie entraîne un épuisement des matières premières et la pollution de l’environnement. 
Le fait d’inonder l’Afrique de déchets électroniques permet aux fabricants de produits électroniques du monde industrialisé de se soustraire à leurs responsabilités relatives à la bonne gestion des produits en fin de vie qu’ils mettent sur le marché. La mise en œuvre des politiques de REP s’impose de plus en plus en Afrique en raison de l’augmentation du niveau des mouvements transfrontières de déchets électroniques au sein des pays africains et de l’absence d’installations pour leur traitement approprié. 

Voici quelques raisons qui expliquent l’ampleur du traitement informel des déchets électroniques en Afrique: 

  • Les déchets sont considérés comme une ressource et une opportunité de création de revenus. 
  • Les services de collecte et d’élimination des déchets coûtent plus cher (représentent une part plus élevée du revenu moyen) que dans les pays développés.
  • On note une réticence à payer pour des services de recyclage et d’élimination des déchets ; les consommateurs préférant vendre leurs appareils en fin de vie pour en tirer de l’argent. 
  • Les consommateurs, collecteurs, et recycleurs ne sont pas suffisamment sensibilisés aux dangers potentiels des DEEE et du « recyclage en arrière-cour ». 
  • Il n’existe pas, ou pas suffisamment, d’installations formelles de recyclage. 

Faire des évaluations des risques sanitaires est un impératif afin d’analyser les conséquences d’une gestion inappropriée des déchets électroniques. Les résultats seront rendus publics, et assortis d’une sensibilisation des recycleurs informels et du grand public. 

Il est également constaté que certains déchets électroniques sont exportés illégalement sous le couvert d’équipements d’occasion.  

Source:https://link.springer.com/article/10.1007/s42452-022-04962-9/figures/1

Impact des déchets électroniques en Afrique

Impact sur l’environnement

Les polluants rejetés dans l’environnement lors d’un traitement inapproprié des déchets électroniques sont pour la plupart toxiques et cancérigènes. Des niveaux élevés de ces polluants ont été constatés dans la poussière, les sols et la végétation, y compris les plantes comestibles. Des concentrations de métaux lourds ont également été observées dans les milieux aquatiques et marins en aval, ce qui entraîne une contamination marine nocive. Ces contaminants peuvent être imputables aux opérations de traitement des déchets électroniques qui peuvent également avoir un impact sur la couche d’ozone et le changement climatique par le biais du brûlage à ciel ouvert, car du CO2 est également libéré. Les niveaux croissants de POP industriels dans l’atmosphère ont été associés au problème des déchets électroniques. 

La santé humaine

Des tests effectués sur des travailleurs des déchets électroniques et des personnes vivant à proximité d’un tel environnement ont montré que des toxines relâchées dans l’environnement se bioaccumulent dans les tissus humains. Les impacts de ces toxines sur la santé comprennent la génotoxicité, la neurotoxicité, les perturbateurs endocriniens, etc. Les personnes intervenant directement dans le traitement des déchets électroniques sont principalement confrontées à des problèmes de santé comme des blessures physiques, des symptômes de maladies des voies respiratoires, des maux de tête, des douleurs corporelles, des maux d’estomac, etc.  

Impact économique et social

En dépit de l’impact négatif des opérations de traitement des déchets électroniques en Afrique, ce secteur présente d’autres avantages socioéconomiques. Par exemple, l’utilisation d’équipements électroniques d’occasion et réparables a permis aux particuliers et aux petites et moyennes entreprises (PME) d’acheter du matériel électronique et informatique peu coûteux mais essentiel, contribuant ainsi au développement socioéconomique. En outre, le recyclage informel des déchets électroniques constitue une principale source de subsistance pour de nombreuses communautés pauvres en Afrique. Par exemple, le centre d’Agbogbloshie au Ghana, qui est connu comme le plus grand site de déchets électroniques d’Afrique subsaharienne, crée environ 4 000 à 6 000 emplois directs et soutient ainsi de solides opportunités économiques.  

Défis de la gestion des déchets électroniques

L’absence d’infrastructures permettant une gestion appropriée des déchets, le vide juridique concernant spécifiquement les déchets électroniques, le manque d’application des réglementations existantes et l’absence de cadre établi pour la reprise des produits en fin de vie, etc. sont quelques-uns des obstacles à la gestion efficace et appropriée des déchets électroniques. Il est difficile d’obtenir des données précises sur les déchets électroniques, car ce type de déchets se retrouvent dans plusieurs secteurs industriels et constituent un sujet de préoccupation environnementale relativement nouveau au niveau mondial. En outre, le manque de sensibilisation aux risques liés à de telles activités, le manque de connaissances sur les meilleures pratiques et le manque d’accès aux capitaux d’investissement pour financer l’amélioration des opérations sont quelques-uns des facteurs pénalisants pour une gestion adéquate et sure des déchets électroniques. Les technologies actuelles, en mesure d’assurer une gestion appropriée de ces déchets, ne sont généralement pas rentables et beaucoup ont donc recours à des opérations manuelles.